Open/Close Menu Paroisse catholique à Lyon

Fête de la Sainte-Trinité A – 4 juin 2023
Ex 34, 4b-6.8-9 – Dn 3, 52, 53, 54, 55, 56 – 2 Co 13, 11-13 – Jn 3, 16-18
Homélie du P. Franck Gacogne

Il y a beaucoup de gens, parmi les catholiques qui disent que Dieu a dû envoyer son Fils dans le monde en quelque sorte pour le réparer, le corriger parce qu’il partait à la dérive, parce qu’il était dépravé ou ne croyait plus en Dieu. Tout cela est absolument faux !

L’unique raison pour laquelle Dieu envoie son Fils, nous l’avons entendu dans la bouche de l’évangéliste Jean, c’est au contraire parce qu’il aime le monde d’une manière surabondante. Et à cause de cela, le Fils trépigne d’impatience de vouloir aller partager la vie des hommes, pour se rendre accessible à eux, compréhensible et désirable, pour leur offrir sa vie, la vie éternelle. C’est précisément cela que l’on appelle « le salut ». Irénée de Lyon ne cesse d’expliquer dans toute son œuvre cet essentiel de la foi.

S’il y a une seule phrase qu’il fallait connaître par cœur de l’évangile de Jean, je crois qu’il faudrait que ce soit celle de ce jour : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique ». Marie-Léane, Francisco, Lucien, les sacrements que vous recevez ce matin en sont pour nous la plus parfaite illustration. Dieu se donne à vous par amour et sans réserve, parce qu’il vous aime infiniment, et vous l’avez reconnu comme tel. Merci de nous permettre à tous d’en être les témoins.

Ce que nous fêtons aujourd’hui s’appelle dans le jargon de l’Eglise et pour tous les chrétiens la Sainte Trinité. Voilà un mot bien compliqué, posé pour dire une expérience pourtant simple de Dieu. Je vais peut-être vous surprendre, mais les apôtres n’ont rencontré ni Dieu, ni la Trinité… Ils ont fait un bout de chemin avec Jésus qui leur a parlé de son Père en leur disant combien ils étaient unis. Et de ce Fils uni au Père, ils ont reçu la force qui se dégageait de leur relation et qui leur permettait de continuer la route, cette force c’est l’Esprit Saint. Petit à petit, ils ont compris que le Dieu unique était chacun. Nous affirmons que Dieu est un, et nous nommons Trinité ce Dieu unique qui a choisi lui-même de se révéler comme Père, comme Fils, comme Esprit Saint. La Trinité n’est ni un concept ni une idée, c’est la manière dont Dieu a choisi de se révéler, c’est l’expérience qu’en ont fait les apôtres. Cela veut dire qu’en Dieu lui-même, il y a de la relation, de l’échange, il y a comme une circulation de vie, c’est pour cela que l’on peut dire de Dieu qu’il est vivant, qu’il est amour, et non pas figé ou solitaire.

Dire que le Dieu unique se manifeste en trois personnes, cela nous permet de sortir d’une impasse morbide : celle d’un Dieu qui se ferait face à lui-même. La Trinité nous sort de ce cauchemar pour nous ouvrir à un style de vie relationnel en Dieu, marqué par un échange, marqué par une circulation d’amour au centre de laquelle Dieu place l’homme. Si Dieu se décline en trois personnes c’est pour dégager un centre. Pour Dieu, c’est l’homme qui est au centre, en vue d’amener l’homme à choisir en toute liberté de faire de Dieu le centre de sa vie.

Quand on cherche des représentations de la Trinité, on trouve bien sûr sur la magnifique icône de Roublev tellement suggestive dans les échanges de regards. Pour ma part, la plus belle représentation que je connaisse est contemporaine, c’est cette céramique appelée « Trinité miséricordieuse ». Prenons le temps de la contempler et de la décrypter.
On y voit un cercle au centre dans lequel se trouve l’homme, l’humanité sombre parce qu’accablée, recroquevillée, mal en point, l’humanité dans toute sa faiblesse. Autour et imbriqué dans ce cercle central viennent se greffer trois autres cercles. Du cercle supérieur survient l’Oiseau de Feu, la Colombe ardente, l’Esprit créateur, Force de vie, le Consolateur. Il fait irruption dans l’humanité pour lui communiquer sa puissance vitale. A droite se tient le Père, ses mains soutiennent l’homme, ses lèvres lui caressent le visage et lui murmurent peut-être à l’oreille : « tu es mon fils, mon bien-aimé », c’est le Père de l’enfant prodigue, le Bon Samaritain… Enfin à gauche, vêtu comme le Père, voici Jésus, « lui, qui de condition divine, s’est abaissé ». Il a pris notre condition humaine en se faisant Serviteur de l’homme, lui lavant et lui baisant les pieds.

Dans cette sculpture, c’est bien l’homme qui est au centre, mais au centre de toute l’attention de Dieu, englobé de l’amour de Dieu, de sa charité et de sa miséricorde. Nous avons là le penchant naturel de Dieu, son inclination qui le pousse à se préoccuper de l’homme, à prendre soin de lui, « pour nous les hommes, et pour notre salut, il descendit du ciel ».

Cet homme, cette femme, c’est l’humanité, vous qui recevez ce matin un sacrement, vous êtes au cœur de toute son attention. Mais c’est aussi chacun d’entre nous. L’amour circule en Dieu au bénéfice de l’homme qui en exprime le désir. Que je ne cesse de te rendre grâce Seigneur pour l’honneur que tu nous fais de nous placer au cœur d’un tel échange. Amen.