Fête du Saint Sacrement – 2 juin 2024
Ex 24, 3-8 – Ps 115 (116b), 12-13, 15-16a, 17-18 – He 9, 11-15 – Mc 14, 12-16.22-26
Homélie de Franck Gacogne
Est-ce que l’on a bien pris conscience de ce qui a été lu dans le livre de l’Exode : « Moïse prit la moitié du sang et le mit dans des coupes ; puis il aspergea l’autel avec le reste du sang » et un peu plus loin « Moïse prit le sang, en aspergea le peuple, et dit : « Voici le sang de l’Alliance que, sur la base de toutes ces paroles, le Seigneur a conclu avec vous. ». Je ne sais pas vous, mais moi, ma première réaction, c’est de me dire, « Mais est-ce que c’est bien la Bible, ou le dernier scénario d’un film gore, d’un film d’horreur ! ». Voilà en effet des lectures plutôt sanguinolentes aujourd’hui ! On y parle de sang du début à la fin. Qu’est-ce que tout cela peut bien vouloir signifier ? Je crois vraiment que le thème du sang dans la Bible et plus spécialement dans ces lectures demande une explication, parce que souvent, nous associons le sang à la douleur, à la violence, à la mort. Bien sûr le sang peut représenter la mort y compris dans la Bible, mais il faut surtout comprendre que le plus souvent on parle du sang dans la Bible comme le signe le plus fort, le plus manifeste de la vie. Dans la Bible, le sang, c’est d’abord le signe de la vie. Pensons au don du sang, aux transfusions, le sang est l’élément vital qui vient régénérer la vie de ceux qui sont affaiblis. Si le sang infesté par la maladie peut être fatal, le sang indemne lui, quand il est donné, et transmis sauve des vies.
Dans cette lecture de l’Exode, le sang qui représente la vie permet de parler de l’Alliance. Il signifie l’Alliance entre Dieu et les hommes : le sang des animaux est à la fois répandu sur l’autel et sur le peuple et cela pour bien signifier que c’est une même vie qui relie Dieu et son peuple. La façon qu’avaient les Israélites de rendre un culte à Dieu était de lui offrir des sacrifices d’animaux. Mais avec le Nouveau Testament un virage radical est pris, car Jésus met fin à ces sacrifices-là. Lors de son dernier repas, il n’en fait pas. Nous l’avons entendu dans l’évangile, et nous le redisons dans chaque eucharistie en élevant la coupe, Jésus dit que c’est : « le sang de l’alliance nouvelle versé pour la multitude en rémission des péchés ». Cette phrase est bien mystérieuse, mais elle veut signifier au moins deux choses. Tout d’abord que Jésus en s’offrant lui-même, plutôt qu’en offrant des animaux à sa place, donne sa vie en inaugurant une alliance vraiment nouvelle, une radicalité dans le don de soi, et une proximité de Dieu. 2ème chose, cette phrase signifie aussi que si Jésus se donne totalement jusqu’à la mort, ce n’est pas parce qu’il serait un peu maso, mais c’est parce qu’il n’y a pas un seul moment où il a renoncé à nous aimer, même quand le mal et le péché l’ont crucifié, et par ce geste d’amour absolument inouï il nous délivre de ce mal qui ronge nos vies, qui nous empêche de donner et de nous donner pour les autres.
Aujourd’hui, c’est la fête du Saint Sacrement, Corps et du Sang du Christ : quelle chance de faire sa première communion précisément ce jour-là. L’Eucharistie n’est pas seulement un repas que l’on prend ensemble et où l’on s’unit les uns aux autres. Cet aspect est important mais pas suffisant. L’Eucharistie, c’est aussi l’union de chacun à Jésus qui se donne en nourriture, il vient prendre corps en chacun de nous afin de favoriser entre nous la communauté des croyants. Communier, c’est recevoir la vie pour la donner. Prenez ce pain, ceci est mon corps. Buvez ce vin, ceci est mon sang. Par ces mots, Jésus nous dit : c’est moi ! Je me donne à vous pour que vous ayez la vie, ma vie, pour que vous viviez en enfants de Dieu.
Pour terminer, je vous propose cette question inédite et un peu insolite : quel était le groupe sanguin de Jésus ? A mon avis O-. Parce que Jésus, c’est le donneur universel de vie. Tous peuvent le recevoir. Dans l’eucharistie, nous sommes transfusés, nous recevons la vie même de Dieu pour devenir des vivants et à notre tour des donneurs de vie. Que le Corps et le sang du Christ viennent régénérer en nous la vie de Dieu.
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