Open/Close Menu Paroisse catholique à Lyon
Michel Quesnel

7e dimanche de Pâques B – 16 mai 2021
Ac 1, 15-17.20a.20c-26 – Ps 102 (103) – 1 Jn 4, 11-16 – Jn 17, 11b-19
Homélie du P. Michel Quesnel

Pour la seconde fois en deux dimanches, nous avons entendu cette phrase superbe de la 1ère épître de Jean : « Dieu est amour. » Quand on a dit cela, on a l’impression d’avoir dit l’essentiel sur Dieu. Mais attention ! Ne soyons pas dupe des formules ! Dire que Dieu est ceci ou cela n’est pas une définition de Dieu. Dieu ne peut jamais être défini par un attribut quel qu’il soit.

En contrepoint de la phrase « Dieu est amour », il est important de repérer dans la Bible d’autres endroits où l’expression « Dieu est » est suivie d’un attribut. On en trouve plusieurs dans les Psaumes. Ainsi celle-ci : « Dieu est mon libérateur, le rocher qui m’abrite, mon bouclier, mon fort, mon arme de victoire » (Ps 17,3). Elle est aussi vraie que « Dieu est amour ». Et pourtant, je sais bien que Dieu n’est pas un gros caillou ni une épée à deux tranchants. Lorsque nous disons « Dieu est », nous ne pouvons parler que par analogie. Et parfois, lorsque nous disons quelque chose sur Dieu, il faut savoir compléter ce que nous disons par une affirmation contraire.

Dans une communauté de religieuses que j’ai fréquentée, je me rappelle ce dialogue entre deux jeunes sœurs dont l’une était d’origine allemande. Celle-ci, lorsqu’elle était témoin d’un événement heureux, lançait parfois cette formule : « Dieu est grand. » Mais l’autre, avec beaucoup de finesse, lui répondait : « Je le préfère petit. » Les deux affirmations étaient aussi vraies l’une que l’autre. Car il est vrai que Dieu est grand. Mais le Dieu biblique s’est fait petit enfant dans la crèche, homme de douleur et de mépris sur la croix.

Ainsi, lorsque nous disons que Dieu est amour, le contenu de cette affirmation mérite d’être explicité. En quoi Dieu est-il amour ? L’histoire biblique nous aide à le savoir.

Dès le début du livre de la Genèse, le récit de la création nous fait comprendre que, par sa Parole, Dieu crée du non-Dieu : c’est l’univers. Dieu n’a pas besoin que le monde existe. Il se suffit à lui-même. Mais l’amour véritable est nécessairement débordant : celui qui aime sort comme en dehors de soi-même pour s’attacher à un autre. Oui, la création est un des résultats de l’amour de Dieu.

En plus, dans cet immense univers, existe une petite planète à laquelle Dieu a accordé une destinée particulière : la terre. Sur cette terre la vie prolifère et, parmi les vivants, existent des animaux auxquels Dieu a donné des qualités exceptionnelles, les humains : « Dieu créa l’humain à son image, à l’image de Dieu il le créa, il les créa homme et femme » (Gn 1,27).

Et l’on pourrait ainsi raconter l’œuvre de Dieu au fil des siècles : si l’on reprend le verset du Psaume 17 que j’ai cité précédemment, Dieu est aussi « libérateur », et « sauveur ». Car les humains, pourtant créés à l’image de Dieu, ne sont jamais capables d’aimer comme Dieu les aime. Dieu s’est alors fait connaître au peuple juif et l’a plusieurs fois libéré au cours de son histoire.

La libération ultime, c’est celle qui nous a été acquise par Jésus, le Fils de Dieu, qui est devenu un être humain, petit, faible et fragile ; et qui accepta ensuite d’être mis à mort par d’autres humains. La mort de Jésus en croix est l’acte d’amour divin le plus étonnant de toute l’histoire humaine.
Au terme de cet itinéraire s’est révélée une autre dimension de la formule « Dieu est amour » : Dieu est Trinité. Entre les trois personnes divines existent des relations amoureuses. La Trinité pourrait se suffire à elle-même, mais elle préfère être créatrice et sauver sa création.

Quelles conséquences tirer pour nous de toutes ces réflexions ? Il semble que la page de l’évangile de Jean que nous avons entendue peut nous aider à le faire. C’est un extrait de la longue prière que Jésus adresse à son Père dans le discours après la scène.

Jésus prie pour ses disciples. Il demande d’abord qu’ils soient un, comme le Père et le Fils sont un tout en étant différent l’un de l’autre. Il demande encore que le Père nous garde du Mauvais. Il demande enfin que nous soyons sanctifiés dans la vérité. Autrement dit, que nous vivions entre nous des relations amoureuses dont le modèle est les relations qui existent entre le Père et le Fils. Vaste programme !

N’espérons pas y parvenir. Dans l’évangile de Jean, Jésus a dit à plusieurs reprises que nous aimer les uns les autres est un commandement. On pourrait tout aussi bien dire que c’est un modèle, dont nous ne réaliserons jamais que de pâles copies. Les tableaux des grands peintres sont souvent copiés. L’artiste qui réalise ces copies ne se fait pas d’illusions sur la valeur de l’œuvre qu’il réalise ; elle ne vaudra jamais le modèle ; mais il cherche à s’en approcher le plus possible.

Ayons donc devant les yeux l’amour qui unit le Père et le Fils. Essayons de nous en imprégner par la prière et la fréquentation de l’Ecriture. L’œuvre que nous réaliserons parviendra peut-être à être une copie, pâle et cependant réelle, de l’amour que se portent les personnes divines.