Open/Close Menu Paroisse catholique à Lyon

33e dimanche du temps ordinaire B – 14 novembre 2021
Dn 12, 1-3 – Ps 15(16) – He 10, 11-14.18 – Mc 13, 24-32
Homélie du P. Franck Gacogne

Avons-nous bien entendu : « En ces jours-là, après une grande détresse, le soleil s’obscurcira et la lune ne donnera plus sa clarté ; les étoiles tomberont du ciel, et les puissances célestes seront ébranlées ». Qu’en pensons-nous ? Qu’avons-nous envie de dire ? Bizarre, terrifiant, insupportable ! Et pourtant, dans deux jours, nous irons peut-être voir avec empressement le dernier film fantastique à l’affiche avec un scénario identique, et bluffé par les effets spéciaux, nous dirons en sortant de la salle : extraordinaire, génial ! Pourquoi avons-nous alors tant de mal à attribuer ces mots à l’évangile ? Pourquoi donc ? Eh bien je crois que c’est d’abord parce que nous avons la très mauvaise habitude de lire l’évangile en voulant le mettre immédiatement en rapport avec notre vie comme s’il n’y avait aucun écart historique, culturel, géographique, ou linguistique entre l’auteur et nous. Nous avons souvent la mauvaise habitude de lire l’évangile comme un livre de morale qui nous indiquerait méticuleusement comment mener une vie droite et irréprochable. On se trompe ! La première question que nous devons nous poser lorsque nous lisons un texte biblique quel qu’il soit, c’est non pas : « qu’est ce texte me demande de faire », mais plutôt « qu’est-ce que ce texte me dit de Dieu ? » Et de la réponse que nous formulerons, nous en déduirons, dans un second temps, une conséquence et un agir pour notre vie. Si ce texte est difficile de premier abord, c’est parce qu’il appartient à un genre littéraire particulier, celui de « l’apocalyptique », c’est-à-dire qu’il va utiliser l’imaginaire, de la même façon que les paraboles utilisent elles aussi l’imaginaire pour faire comprendre quelque chose. Et si, dans cet évangile, nous avons du mal à y discerner le visage de Dieu, c’est parce que l’imaginaire au temps de Jésus n’est plus le nôtre, et alors c’est parfois l’inverse qui se passe, et on ne comprend plus rien !

Qu’y-a-t-il donc à comprendre dans cet évangile ? Déjà qu’au moment où Marc écrit ce passage, les disciples sont confrontés à de graves persécutions, il s’agit donc pour l’évangéliste de redire que le Christ est victorieux de la mort au matin de Pâques et qu’il a le dessus sur les forces du mal. C’est le sens de l’expression : « on verra le Fils de l’homme venir dans les nuées avec grande puissance et avec gloire ». La « nuée », c’est le décor traditionnel de la manifestation de Dieu dans l’Ancien Testament, cela signifie qu’en Jésus, c’est Dieu lui-même qui vient sur la terre pour accomplir sa promesse de rassembler et sauver tous les hommes. 2ème image compliquée : « le soleil s’obscurcira et la lune ne donnera plus sa clarté ; les étoiles tomberont du ciel … ». Cela me fait penser à « Tintin et le Temple du soleil », vous savez la scène sur le bûcher où Tintin se réjouit de l’éclipse, alors que tous ceux qui croient au Dieu soleil sont affolés et courent dans tous les sens. Eh bien au temps de Jésus, les grands voisins des Juifs adoraient eux aussi le soleil, la lune et les étoiles comme des dieux et des déesses qu’ils redoutaient. Le texte suggère donc ceci : qu’apparaisse le Fils de l’Homme, et le temps de ces divinités est révolu. Pas de puissances célestes au-dessus de Dieu et de son Envoyé, Jésus-Christ. Ce message vous l’avez donc bien compris n’est pas une menace, bien au contraire. Fin du monde ne rime pas avec épouvante, mais avec espérance. C’est confirmé par la 3ème image qui suit : « dès que les branches deviennent tendres et que sortent les feuilles, vous savez que l’été est proche… », Jésus fait se lever le printemps, le Fils de l’homme apporte le Salut au dernier jour comme le printemps du monde.

Au fur et à mesure que tout ceci s’éclaircie, avons-nous toujours envie de dire : terrifiant, insupportable, ou plutôt fantastique, génial ? Car à chaque fois que nous entendrons l’évangile comme une parole menaçante, attristante ou destructrice, c’est qu’il y aura quelque part un contre sens à déconstruire pour y découvrir la Bonne Nouvelle cachée que Dieu vient nous révéler.

Les images utilisées nous parlent de la fin d’un monde. Le Christ a donné sa vie pour hâter la fin d’un monde marqué par la haine, la mort ou le péché. Voilà pourquoi la résurrection de Jésus est l’anticipation de ce monde nouveau qui est initié par le Christ et déjà commencé, mais on le voit bien, il n’est pas encore accompli : situation de détresse, de haine, d’incompréhension, d’abus sont toujours présentes. Prenons conscience que le Christ, lui, a déjà tout donné en se donnant. Les mains de Dieu pour agir et servir, le cœur de Dieu pour rester sensible à toute détresse, les mots de Dieu pour dire une parole d’espérance. Aujourd’hui, ces mains, ce cœur et ses mots ce sont les vôtres, les nôtres, ils doivent manifester ainsi l’éclosion de cette humanité nouvelle que Jésus a appelé le Royaume de Dieu. Aujourd’hui c’est de cette façon qu’il se manifeste encore à nous et par nous.

Donne-nous Seigneur par nos gestes, nos paroles, nos attitudes d’être d’humbles serviteurs pour contribuer à l’avènement de ton règne. Amen.