
4ème dimanche de Pâques, dimanche du Bon Pasteur – 11 mai 2025
Ac 13, 14.43-52 – Ps 99 (100)1-2, 3, 5 – Ap 7, 9.14b-17 – Jn 10, 27-30
Homélie de Éric de Nattes
« Mes brebis écoutent ma voix »
« Le Père et moi, nous sommes un. »
Dans le Prologue, Saint Jean rappelle cette évidence : « Dieu, nul ne l’a jamais vu. » Mais il pourra immédiatement ajouter : « Mais en Jésus, son unique, son Bien-Aimé, nous avons contemplé sa gloire. Il a demeuré parmi nous » C’est donc bien les yeux fixés sur Jésus et sa manière d’être et de faire et de vivre avec ses disciples et toutes les personnes qu’Il rencontre, que nous pouvons contempler la manière dont Dieu agit pour nous. C’est donc bien les oreilles grandes ouvertes sur les Paroles de Jésus, ses paraboles, ses enseignements, lui qui est le Verbe éternel, la Parole de la vie, que nous entendons Dieu s’adresser à nous. C’est le cœur ouvert à la relation qu’il nous propose : « Je ne vous appelle plus serviteurs car vous êtes mes amis », que nous entrons, émerveillés, dans un lien intime, vivant, confiant, heureux, avec Dieu. Il nous faut toujours garder cela au cœur. Lorsque quelqu’un parle de ‘Dieu’, ou le fait parler – lui qui comme moi, comme vous, ne l’a jamais vu – est-ce que ce qu’il dit résonne avec l’Évangile – la Bonne Nouvelle – celle qui invite la vie à se relever, à être à nouveau suscitée, libérée, reliée au Dieu des vivants ? C’est notre joie et notre boussole, ce qui fait que nous sommes chrétiens : nous connaissons le Pasteur, le Berger, Celui qui conduit vers le Père, vers la vie et nous l’écoutons.
« Mes brebis écoutent ma voix ; moi je les connais, et elles me suivent. »
Vous savez qu’écouter, dans l’univers de la Bible, ce n’est pas entendre des mots, et comprendre le message avec son cerveau. C’est disposer tout son être, son cœur profond, à accueillir une parole qui fait vivre, qui ouvre un chemin, qui réconforte, qui recrée l’alliance, l’assurance d’être aimé. C’est bien pour cela que ce mot est dans le premier des commandements : « Écoute, Israël, le Seigneur ton Dieu, de tout ton cœur, de toutes tes forces… » Et c’est bien pour cela que Jésus dit à ses disciples : « Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître. » Ce qui veut dire que le Berger lui-même, avant que de parler aux brebis, est d’abord celui qui écoute la source d’où coule toute vie : le Père. Alors écouter de cette manière-là, c’est vraiment aimer, puisque c’est disposer tout son être à se laisser toucher par celui qui parle, imprégner de sa parole. C’est se décentrer de soi pour mieux se retrouver. Et se retrouver différent, nouveau, plus vivant. C’est ça le bienfait de l’écoute. Aller vers soi en acceptant de se quitter. Ça peut sembler paradoxal, mais c’est pourtant le commandement de Dieu à Abraham : ‘’quitte ton pays, ce que tu connais, ce dans quoi tu crois savoir qui tu es parce que c’est familier. Alors tu marcheras vers la terre promise, vers le mystère que tu es, Fils, Fille du Très-Haut, Vivant, et relié à la multitude, un peuple nombreux’’. Est-ce que nous écoutons ainsi ? Est-ce que nous la ruminons cette parole. Est-ce que nous l’écoutons résonner dans notre existence de chaque jour ? Est-ce que nous lui laissons le temps de nous toucher, de nous transformer en la savourant. C’est cela suivre Jésus. Il prévient d’ailleurs ses disciples : ‘’Il ne suffit pas de dire Seigneur, Seigneur, mais de mettre la parole en pratique’’. C’est-à-dire la vivre, là où chacun est planté, concrètement, dans des relations vraies, celles qui nous font vivre et nous éprouvent. Et c’est pour cela qu’écouter et obéir dans la Bible, c’est presque synonyme. Lorsque j’écoute ainsi, je dispose mon cœur à agir selon ce que j’entends : ‘’Qu’il me soit fait selon ta parole’’. Cette obéissance-là, c’est très profond ! Comme à notre insu, nous devenons peu à peu le Berger que nous écoutons, sa vie passe en nous et elle nous ouvre des horizons nouveaux, incroyablement vastes, ceux de la vie divine. Nous n’en revenons pas ! Cette vie vivante, vibrante, riche, celle qui ne meurt pas, sur laquelle les puissances de la mort n’ont pas de prise, celle dont nous voulons maladroitement nous emparer en rêvant d’être immortels, elle nous est en vérité donnée. Encore faut-il l’accueillir. « Si tu savais le don de Dieu! »
« Je leur donne la vie éternelle : jamais elles ne périront, et personne ne les arrachera de ma main. »
Voilà donc le mystère de la Toute-Puissance de Dieu éclairé par la Passion, la mort et la résurrection de Jésus. En Dieu est la Vie. La vie qui ne peut être asservie par les puissances du mal, la vie qui ne meurt pas, la vie éternelle dit St Jean. Mais cette vie, elle se donne, et jusqu’à l’extrême, jusqu’à se ‘déposer’ pour reprendre le vocabulaire de Jean par amour pour ses amis. Oui, le mal a cru prendre cette vie, la détruire et triompher dans la mort. Mais Dieu, Lui, en Jésus, l’a donnée jusqu’au bout, à l’image du Père, dans un acte d’amour sur lequel le mal n’a pu avoir aucune prise. Le mal n’a pu contaminer ce don : « En tes mains, Père, je remets ma vie. » Nous avons contemplé la Croix : la sinistre réussite du pouvoir du mal : la mort ; mais aussi le don inouï de Dieu, celui de sa vie jusqu’au bout : l’eau et le sang de la vie sont sortis du côté du Christ. Dans ce retour du Fils vers le Père, retour dans lequel il nous entraîne, nous, la multitude, il nous a promis de ne pas nous laisser orphelins. Il a répandu sur ses disciples l’Esprit Saint, la force d’En-Haut par laquelle le Père a ressuscité le Fils. Viens, Esprit Saint, enflamme le cœur de tes fidèles, fortifie leur foi, et donne-leur de témoigner de l’Évangile du Christ à jamais vivant !